Choisis la vie !
Saint Paul, dans le livres des Actes des Apôtres résume sa mission reçue d’en haut exprimée par Jésus lui-même, qui lui apparaît en plein midi, sur le chemin de Damas alors qu’il persécutait les chrétiens.
« En chemin, vers midi, je vis, venant du ciel et plus éclatante que le soleil, une lumière qui resplendit autour de moi et de ceux qui m'accompagnaient. (...) Relève-toi et tiens-toi debout. Car voici pourquoi je te suis apparu: pour t'établir serviteur et témoin de la vision dans laquelle tu viens de me voir et de celles où je me montrerai encore à toi. C'est pour cela que je te délivrerai du peuple et des nations païennes, vers lesquelles je t'envoie, moi, pour leur ouvrir les yeux, afin qu'elles reviennent des ténèbres à la lumière et de l'empire de Satan à Dieu, et qu'elles obtiennent, par la foi en moi, la rémission de leurs péchés et une part d'héritage avec les sanctifiés. » (Ac 26, 16-18)
Nous pourrions nous inspirer de tous ces thèmes évoqués par le Christ à l’Apôtre, en vue de mieux recevoir le message de Marguerite, après ses trois ans d’apparitions à Tournai de 1948 à 1951, quand elle était âgée de 13 à 15 ans. Cette relecture aujourd’hui avec un recul dans l’histoire de plus de 60 ans, nous immerge à la fois dans l’Evangile et dans la vie de l’Eglise et du monde en toute son actualité : menaces et persécutions, mais aussi progrès de l’unité entre les hommes et de la Nouvelle Evangélisation.
Les thèmes saillants de ce message prophétique reçu par l’apôtre Paul font apparaître des clefs de lectures de l’événement des 26 apparitions de Tournai : Celles d’une étoile, de la Vierge Marie, de l’ange, sans oublier deux visions du purgatoire et une vision symbolique du cœur douloureux de Marie, percé d’un poignard.
« Le cœur est le cœur de la Sainte Vierge, et le poignard, la souffrance qu’elle éprouve en voyant que les croyants ne pensent pas assez à leurs frères. » Jeudi 25 janvier 1951.
Marguerite, en fait, sera témoin habituellement de deux visions qui vont se superposer : celle d’une étoile, et ensuite celle de la Vierge Marie. Cette étoile symboliquement apparue toute seule au départ, le 2 mars 1948, au-dessus de la reproduction d’une grotte de Lourdes dans la cour de l’école de la Madeleine où Marguerite est visitée, sera le centre et le cœur pourrait-on dire de tout le message des apparitions de Tournai. Le lendemain 3 mars, cette étoile apparaît de nouveau et s’approche de Marguerite. Et voici que la Vierge Marie apparaît pour la première fois si bien que Marguerite voit l’étoile placée devant la poitrine de Marie qui se positionne derrière, joignant ses deux mains devant l’étoile, en position d’orante.
Le message lié à cette étoile pourrait nous être donné par ces mots du Christ à l’apôtre Paul : «passer des ténèbres à la lumière. » Et pourtant, il est midi en Europe, comme pour Paul en Syrie, visité sur le chemin de Damas. Pour Marguerite, il est midi lors des deux premiers jours d’apparitions (les 2 et 3 mars 1948). Et nous sommes à la veille du printemps, en début de carême, temps liturgique qui nous prépare à la victoire du Christ ressuscité après 20 sa mort sur la Croix et sa mise au tombeau. Lors de la troisième rencontre, les premiers mots échangés offrent le noyau dur de tout le message, et qui sera déployé durant toutes les apparitions qui suivront durant trois ans, le Vendredi 5 mars 1948 : Près de chez ma tante, le matin.
J’ai demandé : Qui êtes-vous ? Elle a disparu. L’étoile est restée. Et j’ai entendu une voix qui disait : « Je suis Notre-Dame des étoiles. Dis au monde de prier : Priez beaucoup pour les pécheurs ! Et il sera récompensé. Faire-part à monsieur le curé Vandercammen.»
Marguerite, interrogée, plus de 60 ans après cet événement, résume tout le message de Tournai par cette invitation à prier.
Mais pourquoi, de nouveau cette invitation au lendemain de la seconde guerre mondiale, après les apparitions de Lourdes en 1854 en France, de Fatima en 1917 au Portugal, et de Banneux et Beauraing en 1933 en Belgique? Et pourquoi ce déploiement du message sur la prière en 26 rencontres : celles de la Vierge Marie (21 fois dont 19 en 1948, un seule en 1950 et en 1951), de l’ange (5 fois dont 2 en 1948 et en 1950 et une seule en 1951) ? Sans oublier cette étoile, centrale.
Il nous suffit alors de reprendre les mots de Zacharie pour saisir l’enjeu de cette symbolique de l’Astre d’en haut qui vient nous visiter « pour illuminer ceux qui demeurent dans les ténèbres et l'ombre de la mort, afin de guider nos pas dans le chemin de la paix (Lc1, 79).»
Jeudi 25 janvier 1951 : Dans ma chambre, le soir. L’ange me dit : « La Sainte Vierge demande de bien prier pour les pécheurs, pour tous les adversaires de la foi et pour la paix.
Le vieillard Siméon témoigne à son tour lors de la présentation de l’Enfant au temple : « Mes yeux ont vu ton salut, que tu as préparé à la face de tous les peuples, lumière pour éclairer les nations et gloire de ton peuple Israël. » (Lc2, 31-3)
Cette promesse faite au monde en cet enfant premier-né présenté au temple de Jérusalem il y a vingt siècles, puis redonnée en Belgique à Tournai à la fin du second millénaire, s’adresse aux croyants, sans doute à tous les croyants, et pas seulement les chrétiens. Ce qui est rappelé à la prière eucharistique au canon 4: « tu as tellement aimé le monde Père très saint que tu nous as envoyé ton propre Fils lorsque les temps furent accomplis pour qu’il soit notre sauveur… » Et nous prions ainsi Dieu pour « tous les hommes » qui le « cherchent avec droiture ».
La dimension inter-religieuse rappelée au Concile Vatican II nous renvoie à l’Evangile : En saint Matthieu, c’est dans une grotte que les mages venus d’Orient, -figure de l’universalité du salut offert à tous-, conduits par l’Astre, vont offrir leurs présents au roi des juifs qui vient de naître. « Nous avons vu, en effet, son astre à son lever, et nous sommes venus lui rendre hommage (Mt 2, 2). » « L’Astre d’en haut » désigne à la fois le Messie, le Fils de Dieu fait chair, et toute sa mission d’Apôtre du Père.
Cette mission du Christ s’accomplit désormais en Eglise aujourd’hui, par tous les baptisés. C’est pour cela que, de l’étoile unique apparue aussi à Tournai, nous passons aux 21 étoiles innombrables que nous sommes appelés à devenir par la foi, comme autant de Fils d’Abraham, brillant dans le ciel, et réalisant la prophétie à la fin du Magnificat de la Vierge Marie qui nous rappelle que Dieu « est venu en aide à Israël, son serviteur, se souvenant de sa miséricorde, selon qu'il l'avait annoncé à nos pères - en faveur d'Abraham et de sa postérité à jamais! (Lc 1 54-55) et de même Zacharie proclamait dans son Benedictus :
Ainsi fait-il miséricorde à nos pères, ainsi se souvient-il de son alliance sainte, du serment qu'il a juré à Abraham, notre père, de nous accorder que, sans crainte, délivrés de la main de nos ennemis, nous le servions en sainteté et justice devant lui, tout au long de nos jours. (Lc 1, 73-75)
Si dès le départ, dès la troisième apparition le thème des étoiles au pluriel est évoqué, c’est parce que Marie veut se présenter en lien avec les étoiles que nous sommes en notre mission apostolique : comme reine, elle est celle qui nous protège et nous engage à suivre le Christ. Les textes sur l’Eglise au Concile Vatican II (Lumen Gentium), puis sur la mission des fidèles laïcs, par Jean-Paul II sont la clef de ce thème si important des étoiles à Tournai, qui est repris une seconde fois:
Lundi 4 octobre 1948 : Près de chez ma tante, le soir. Elle me dit : « Je désire qu’on célèbre ma fête le 2 mars sous le nom de Notre Dame des Etoiles. Et que ce jour-là, on récite au moins le chapelet. Je vous réapparaîtrai le 10 de ce mois. » Le soir.
Les apparitions de Tournai réparties sur trois ans nous conduisent à reconnaître progressivement l’identité du Celui qui est en est l’acteur principal : le Christ, et sa lutte qu’il partage avec sa mère et nous, pour emporter la victoire contre le mal. Au point que vers la fin des apparitions, le 18 mars 1950 la Vierge Marie s’en fait l’écho par ces paroles :
« Mon Fils est très courroucé car il voit que le monde ne l’écoute plus. Il ne veut faire ici que des miracles dans l’âme, point du corps. Il répète les désirs suivants : Que l’on me fête le 2 mars sous le nom de Notre-Dame des étoiles, que ce jour-là on récite au moins le chapelet et que l’on assiste à la Sainte Messe et que l’on y communie si possible. Que l’on bâtisse une grotte dans la cour de l’école actuelle et à la place déjà indiquée ; que l’on mette la statue telle que je vous ai apparu, dans cette cour et à cette même place. Maintenant, je suis satisfaite. Je ne vous apparaîtrai plus, mais ne perdez jamais courage, je suis toujours avec vous car je vous le répète, vous souffrirez beaucoup moralement. Notre Seigneur vous remet vos péchés ainsi que ceux des témoins et toutes les peines dues pour ces péchés. »
En reprenant les paroles de l’apôtre Paul, le commentaire est facile : Il s’agit d’une invitation à la conversion dans une lutte à mener, déjà personnelle, quotidiennement, puis en Eglise. C’est en ce sens que nous recevons les prières enseignées par l’ange et voulues par Jésus :
Dimanche 4 juillet 1948 : Près de chez ma tante, le matin.22 Elle (la vierge) a dit :
« Un ange va vous apparaître pour vous apprendre une prière que mon Fils désire que le monde la dise le matin. » Un ange m’apparut immédiatement et il me dit : « Je vais vous apprendre une prière comme la Très Sainte Vierge l’a annoncé:
« Seigneur, ayez pitié de moi qui suis une pauvre pécheresse.
Seigneur, donnez-moi toujours l’absolution.
Seigneur, faîtes que je meurs en état de grâce.
Seigneur, préservez-moi du péché mortel.
Seigneur, je vous offre ma journée. »
Cette prière qui peut être comprise comme une invitation à la confession, possède aussi un accent inter-religieux, puisque Marguerite précise que le Samedi 19 juin 1948 (Près de chez ma tante, le matin), Je lui ai demandé : « Quelles sont les causes des apparitions ? »
Elle me répondit : « Beaucoup de personnes oublient de prier pour les pécheurs. C’est pour cela que je vous apparais, pour (que) vous leur rappeliez leurs bonnes habitudes ; et s’ils ne prient pas mieux, ils seront punis. Je vous réapparaîtrai le 24 de ce mois. »
Et de même les trois thèmes abordés dans le cadre de la piété populaire par le support du chapelet, sont communs aux croyants de toutes religions en vue de la conversion :
Samedi 18 mars 1950
« Maintenant je vais vous dire une prière que le monde doit réciter entre chaque dizaine de chapelet : « Seigneur, pardonnez-moi tous mes péchés Seigneur, ayez pitié de ceux qui souffrent Seigneur, pardonnez à tous ceux qui vous persécutent. »
Ceci dit, la teneur catholique des apparitions apparaît comme le prolongement d’une démarche qui conduit aux sacrements, telle cette demande d’une messe annuelle en l’honneur de Notre Dame des étoiles, déjà évoquée, et la réception de l’absolution qui sur terre, passe par le ministère sacerdotal. Les prêtres d’ailleurs sont invités explicitement à la prédication : « Je demande au monde d’assister autant que possible aux sermons. Il leur montre de bons exemples et leur crée un bon avenir. » (Dimanche 10 octobre 1948)
Les Protestants pourraient aussi en se référant à cette demande exprimée un dimanche, se savoir concernés, et sensibles à l’invitation, faite à Tournai, à se convertir. De même les Orthodoxes avec leur tradition de la prière du « pèlerin russe » se retrouvent dans la première demande de chaque matin, voulue par le Christ : Seigneur, ayez pitié de moi qui suis une pauvre pécheresse
Enfin les catholiques, dans la mouvance du « Traité de la Vrai dévotion » de saint Louis-Marie Grignion de Montfort comprennent ces prières confiées le Mercredi 22 septembre 1948 : (Près de chez ma tante, le matin.)
Un ange m’apparut à la même place que la Sainte Vierge. Il me dit : « Je vais vous apprendre la prière que la Très Sainte Vierge vous avait prédit. Elle est très courte et très simple, pour permettre aux enfants de comprendre ce qu’ils disent. La voici :
Oh, Marie, intercédez toujours pour nous auprès de votre divin fils.
Oh, Marie, soyez toujours la Reine de notre foyer.
Oh, Marie, écoutez toujours mes prières.
Oh, Marie, détournez-moi toujours du mal et faîtes que je persévère dans le bien. »
La dernière demande nous renvoie à l’alliance du peuple d’Israël et de Dieu. Nous conclurons cette brève présentation à la suite d’un extrait de la dernière apparition et d’un passage du Deutéronome. Il nous ouvre à la loi divine et répond à nos questions liées aux menaces exprimées en termes de punition, conséquence de nos égarements :
Dimanche 11 février 1951 : Dans ma chambre, le soir.
La Sainte Vierge me dit : « Pénitence, Pénitence. Je demande instamment de prier pour les Russes en particulier et enfin en général pour tous les communistes car si les croyants ne veulent changer le monde est en danger. »
L’ange me dit : « Dieu a déjà la main levée pour jeter un fléau afin de punir les Chrétiens, mais Sa mère lui demande, le supplie d’attendre car elle a toujours l’espoir que ça ira mieux.
Je prends aujourd'hui à témoin contre vous le ciel et la terre : je te propose la vie ou la mort, la bénédiction ou la malédiction. Choisis donc la vie, pour que toi et ta postérité vous viviez, aimant le Seigneur ton Dieu, écoutant sa voix, t'attachant à lui; car là est ta vie, ainsi que la longue durée de ton séjour sur la terre que le Seigneur a juré à tes pères, Abraham, Isaac et Jacob, de leur donner. Dt 30, 19-20
Puissions-nous, dans la mouvance du Magnificat où la Vierge Marie chante l’œuvre de Dieu qui renverse les puissants de leurs trônes, devenir assez humbles, en vue d’entrer dans la joie des mages qui ont été visités par « l’astre d’en haut. » Notre-Dame des Etoiles, dans une relation unique à chacun des croyants qu’elle entraîne à participer à la mission de son Fils, nous invite à prendre conscience dès cette terre des conséquences de nos mauvais choix : « Si le monde ne prie pas mieux, il y aura une guerre presque terrible (Jeudi 24 juin 1948) » ainsi que l’horreur des souffrances du purgatoire après notre mort. Mais surtout, elle nous invite comme à Cana à écouter son fils et à espérer cette part d’héritage qui nous attend avec les sanctifiés dont l’apôtre Paul a reçu la promesse.